Abara Deluxe

En tant que mangavore, vous connaissez déjà sûrement Tsutomu Nihei, ancien architecte devenu mangaka, à qui l’on doit le célèbre Blame! et dont l’univers graphique ultra-détaillé a inspiré énormément d’auteurs. Déjà paru aux éditions Glénat en 2007, Abara, une de ses séries courtes en deux volumes, revient sur le devant de la scène avec une réédition Deluxe compilant l’intégral du manga en un seul tome. Disponible depuis le 1er mars 2023 en librairie, nous avons reçu ce magnifique ouvrage et nous avons plongé dans l’histoire de maître Nihei. Enfin, plongé… coulé serait plus exact !

"Abara Deluxe" couverture

Abara-conte moi une histoire

La plus monstrueuse des œuvres de Nihei

Juste après Blame 0 (Noise), c’est au tour d’Abara d’avoir droit à une édition Deluxe. En un seul volume et en grand format, vous pourrez découvrir l’un des points culminants de l’art graphique de Nihei qui a inspiré de nombreux auteurs.

Le lecteur se verra parachuté dans un univers où s’affrontent des créatures monstrueuses : d’un côté, les “shiro gauna“ ou gauna blancs et de l’autre, les “kuro gauna“ ou gauna noirs. Rien que la scène de transformation vaut le détour, et reste une référence immanquable pour tout adepte de Kaiju 8 ou de Chainsaw Man.

Glénat
Les "gaunas" s'incarnent dans la population semant la mort
© Tsutomu Nihei / Kodansha Ltd.

Abara prend place dans un monde post-apocalyptique aux villes immenses et enchevêtrées. Sur ce paysage urbain, deux grandes structures veillent, gardiennes séculaires d’un passé révolu dont le commun des mortels a oublié jusqu’à l’existence. C’est dans ce contexte qu’un homme se rend dans une sorte d’hôpital et, après avoir demandé de l’aide, se transforme en un monstre blanc qui massacre toutes les personnes présentes sur les lieux. Pour contrer la menace, la surveillante Tadohomi se rend dans une huilerie pour retrouver Denji Ito et obtenir son aide. Le monstre qui s’est incarné dans l’homme de l’hôpital est en fait un gauna blanc dont le seul but semble être l’extinction de la race humaine.

"Denji" est obligé de redevenir un gauna noir pour combattre la menace
© Tsutomu Nihei / Kodansha Ltd.

Afin de les combattre, la firme quaternaire a développé des gaunas noirs, dont il n’existe plus que deux exemplaires : Denji, qui s’est échappé, et Nayuta, contrôlée par le bureau de surveillance. Alors que Denji décide d’intervenir, se transforme et éradique le gauna blanc, Tadohomi est arrêtée par la Brigade de répression criminelle qui compte bien trouver le ou les responsables du massacre. Devant l’ordre des hautes instances de libérer la jeune fille, l’inspecteur Sakajima n’a d’autre choix que de s’exécuter, mais il compte bien creuser afin de faire toute la vérité sur cette affaire. Mais il ignore encore dans quel bourbier il vient de mettre le pied, et jusqu’où va l’emmener sa quête.

Lisez un extrait de Abara Deluxe ici !

Y a pas de Blame!

Bien que sept ans séparent la série Blame! d’Abara, on reconnaît d’emblée le style graphique inimitable de Tsutomu Nihei. Ce natif de Fukushima a tout d’abord étudié l’architecture avant de se lancer comme mangaka professionnel au milieu des années 90 après une parenthèse new-yorkaise qui a tourné court. De sa formation, Nihei garde ce soin du détail dans les décors qui fait sa renommée. Chacune de ses cases est un petit bijou qu’il est nécessaire de contempler de longues minutes afin d’en voir tous les détails.

L'architecture est un des point fort de "Tsutomu Nihei"
© Tsutomu Nihei / Kodansha Ltd.

Les cités qui parsèment son œuvre sont immenses et tout en verticalité, mais possèdent également un petit côté organique, une inspiration que l’on sent empruntée au travail de H.R. Giger dont il est un grand fan. Il est à noter que les gaunas, élément central de l’intrigue d’Abara, seront à la base d’un autre de ses mangas : Knights of Sidonia. C’est dire si ses créatures lui plaisent ! Abara Deluxe se conclut par le one shot Digimortal, qui lui est antérieur de deux ans, mais qui en pose les bases sans en reprendre tout l’univers. De quoi comprendre un peu mieux la base de réflexion de l’artiste et de comment il a fait évoluer l’univers de Digimortal pour en façonner Abara.

Les gaunas blancs dans "Abara Deluxe"
© Tsutomu Nihei / Kodansha Ltd.

Soyons honnête, pour le néophyte, la foultitude de détails émaillant chaque planche est souvent le risque de passer à côté DU détail qui permet de comprendre l’avancée de l’intrigue. D’autant que Tsutomu Nihei n’est pas franchement un bavard, préférant les représentations graphiques aux longs discours. Il distille donc les explications au compte-gouttes, l’intrigue restant de toute façon assez cryptique, laissant chaque lecteur se faire sa propre interprétation avec le peu d’éléments à sa disposition.

Je crois que j’ai un Gauna…

La population paye souvent dans "Abara Deluxe"
© Tsutomu Nihei / Kodansha Ltd.

Je dois bien avouer que quand on m’a proposé Abara Deluxe, j’ignorais totalement à quoi m’attendre vu que le titre ne me disait absolument rien. Ce n’est qu’en ouvrant le volume que j’ai fait le rapprochement avec l’auteur de Blame! tant le style graphique des deux mangas est similaire. Il faut le reconnaître, Glénat a fait un travail superbe sur cette réédition. La couverture tout en nuances de blanc, noir et gris est magnifique et le vernis sélectif lui ajoute du relief. À l’intérieur, le papier assez épais et la présence de quelques pages en couleurs viennent rehausser le tout de la plus belle manière qui soit.

La transformation de Denji dans "Abara Deluxe"
© Tsutomu Nihei / Kodansha Ltd.

Mais à mon sens, la bonne idée de l’éditeur, c’est d’avoir opté pour un format assez grand (à mi-chemin entre un format A5 et un format A4) qui permet une réelle appréciation du travail de l’auteur. En effet, comme chaque case est extrêmement détaillée, il est nécessaire de les scruter parfois assez longtemps pour comprendre ce que l’on est en train de regarder, et un format plus petit aurait fatalement contraint le lecteur à laisser échapper des détails parfois minuscules, mais loin d’être anodins dans la compréhension du récit. Moi qui lis très vite en règle générale, je me suis très vite aperçue que je ne pouvais pas appliquer ma méthode à Abara, quand arrivée à la fin de ma première lecture, je me suis aperçue que je n’avais pas compris grand-chose de l’intrigue.

Parfois les dessins fouillés nuisent à la compréhension dans "Abara Deluxe"
© Tsutomu Nihei / Kodansha Ltd.

Certes, en relisant plus lentement, j’ai intégré un peu plus d’éléments, mais il faut quand même souligner que dans les scènes de combats entre gaunas, trop de détails tue le détail. On ignore très souvent ce qui est en train de se jouer sous nos yeux ou même ce qui est tout simplement représenté. Bon, cela étant dit, moi qui aime avoir tous les détails d’un récit, avec Abara, je suis restée sur ma faim puisque, comme je l’ai découvert en fin de volume, Tsutomu Nihei lui-même ne se rappelle plus du pourquoi du comment de son scénario. Dans un commentaire d’anthologie, il explique n’avoir jamais relu son manga et en garder peu de souvenirs, ce qui l’amène à s’interroger autant que ses lecteurs. C’est dire !

Les gaunas noirs sont impressionnants dans "Abara Deluxe"
© Tsutomu Nihei / Kodansha Ltd.
Pour conclure…

Avec Abara Deluxe, Glénat signe une réédition de toute beauté pour la série courte de Tsutomu Nihei. Même si le style graphique de l’artiste est assez clivant (on adhère ou pas à son style si particulier), Abara reste tout de même un monument de la science-fiction, dont l’intrigue vous laissera le champ libre niveau interprétation. Et puis, rien que pour l’apparence des gaunas tous plus impressionnants les uns que les autres… ça vaut le coup !

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